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Économie des Ressources Naturelles et de l'Environnement

L’économie de l'environnement est une branche de l'économie qui traite d'un point de vue théorique des relations économiques entre les sociétés humaines et l'environnement.
Elle constitue un champ voisin, mais distinct, de l'économie écologique.
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CONTEXTE ET APPROCHE éCONOMIQUE
L'émergence du concept
De l'effet de serre au recul de la biodiversité en passant par la pollution sous ses formes multiples, la question environnementale a aujourd'hui totalement investi le champ de la discipline économique. Cette révolution culturelle débute dans les années 1970 avec la prise de conscience écologique qui suit la médiatisation des premières grandes pollutions.
Les économies mondiales prennent progressivement la mesure du coût environnemental de l'exploitation des ressources et de la croissance associée au PIB : il s'agit d'une mutation profonde de la perception de l'environnement jusqu'alors peu concernée par les impacts environnementaux.
L'environnement biophysique par le biais des sciences de l'écologie et de l'activité terrestre est associé à des systèmes et des cycles dans l'habitat. Ceux-ci indiquent des seuils et des limites tant en approvisionnement (sur-exploitation des ressources naturelles comme le pétrole ou les réserves halieutiques) qu'en débouchés (pollution des nappes phréatiques, par exemple). Des modèles de croissance économique, en tant que conséquence de l'activité humaine, ont manifestement un impact négatif démontré sur l'environnement.
Cette prise de conscience est récente dans les cultures modernes. L'étymologie du terme économie (de oikos, la maison et de nomos, la règle) témoigne d'une volonté de gestion efficace de la maison, c'est-à-dire l'habitat dans la biosphère, et renvoie à celle de l'écologie (de oikos, la maison et de logos, l'étude).
Si la pensée des Physiocrates ou des classiques liait sans ambiguïté l'économie à la rareté des ressources naturelles, la théorie néo-classique n'a retenu de la rareté que sa dimension financière et a occulté son possible épuisement.
Ainsi la première véritable rencontre de l'économie et de l'écologie (constituée en science) intervient probablement en 1968 au sein du rapport du Cercle de Rome, intitulé « Les limites de la croissance ». Ce texte alarmiste sur les limites des réserves énergétiques marque la redécouverte du concept environnement par la théorie néo-classique.
L'homme, la nature et la technique
Sans entrer dans une étude approfondie et certainement philosophique des rapports entre l'Homme et la nature, on peut noter une évolution culturelle qui passe d'une totale dépendance de l'Homme à la nature, par les fruits et la crainte des aléas climatiques pour les tribus de chasseurs-cueilleurs, à l'apparente indépendance de l'homme moderne par l'exploitation des ressources naturelles.
Ce dernier a longtemps cru pouvoir totalement s'affranchir de son milieu en le transformant, en le domestiquant, voire en l'asservissant, grâce au developpement d'idéologies, grâce aux progrès techniques. Descartes affirmait ainsi que les hommes pouvaient se rendre « comme maîtres et possesseurs de la nature ».
De ce point de vue, l'environnement devient ce qui est autour et nécessaire à l'humain, ce qui lui est étranger et par un glissement de sens ce sur quoi l'homme ne peut agir. Comme nous l'avons vu, il est faux de croire que l'activité humaine n'interagit pas avec l'environnement : source et débouché de l'activité économique, la nature existe avec l'espèce humaine et non pas malgré l'homme. En s'excluant de la nature, l'humain fausse sa perception, sa pensée, ses valeurs, son rôle, son analyse de la situation et perturbe profondément l'habitat. L'objectif de l'économie de l'environnement
C'est dans cette perspective particulière de l'évolution de la culture de l'espèce que s'est élaborée cette expression que certains qualifient d'oxymore voire d'absurdité : l'économie de l'environnement. Son objectif est d'intégrer les valeurs écologiques de l'environnement dans le cadre particulier de l'économie et plus précisément des sciences économiques et sociales. Ce que les économistes néo-classiques avaient rejetés hors de leur champ de vision, probablement inconsciemment, l'économie de l'environnement cherche à l'inclure.
L'économie de l'environnement est la recherche d'une efficacité nouvelle et réelle qui intègre les interactions entre les intervenants mais aussi entre les interventions humaines et l'environnement (au sens large). Cette nouvelle orientation n'est pas exclusive de l'ancienne vision économique : il s'agit au contraire de bâtir avec l'économie traditionnelle un édifice qui tiennent compte de la valeur écologique et des variables environnementales.
Cette évolution n'est pas neutre : elle suppose un certain nombre d'hypothèses de base et surtout elle nécessite de redéfinir des notions centrales de l'économie : le bien-être des individus, la production et l'utilisation des ressources. Dans l'économie néo-classique, le bien-être tient compte de la consommation de biens marchands.
En économie de l'environnement, il faut y ajouter la valeur que les individus confèrent à leur environnement dans un cadre de vie, et finalement sa valeur réel et symbolique souvent impossible à monétiser. La production et l'utilisation globale des ressources biotiques et abiotiques est aussi une corrélation à inclure dans l'évolution de l'architecture économique bâtie.
Théorie économique et environnement
L'économie, du moins sa version néo-classique, s'intéresse aux optima (ou optimums), c'est-à-dire la meilleure allocation des ressources rares à usages alternatifs, compte tenu des préférences des agents économiques, résumées dans une fonction d'utilité. Par exemple, l'optimum de Pareto est certainement l'un des outils les plus utilisés de la science économique : il consiste à se trouver dans une situation telle que toute amélioration du bien-être d'un individu (ou d'une catégorie d'individus) ne peut se faire qu'au détriment d'un autre individu (ou d'une autre catégorie d'individus). Dit autrement, l'optimum de Pareto est une situation où toute l'allocation initiale a été répartie. À ce titre, c'est une situation de référence de la théorie économique, dans la mesure où il est possible de déterminer un optimum de Pareto, à condition de respecter le caractère concurrentiel des marchés et de laisser le système de prix opérer les ajustements.
Pourtant l'équilibre marchand n'est pas nécessairement optimal d'un point de vue social ou environnemental. La recherche de l'optimum se déroulant dans le cadre strict des échanges marchands, certains effets qui ne sont pas affectés d'une valeur, sont complètement écartés de la recherche d'efficacité alors même qu'ils sont susceptibles d'affecter l'utilité des agents économiques. C'est précisément le cas lorsque l'on occulte la dimension particulière que constitue l'environnement : ce sont des effets externes, sous-entendus à l'échange marchand, aussi appelés externalités. Ces externalités peuvent être positives et améliorer le bien-être des agents. Mais elles peuvent aussi avoir une valeur négative si elles réduisent le bien-être sans compensation financière (cas des riverains d'un aéroport : ils souffrent de la pollution sonore et de la baisse de la valeur marchande de leurs biens immobiliers si l'aéroport enregistre une croissance du trafic qui génère des revenus d'exploitation supplémentaires.
Prenons un exemple : une entreprise produit de l'électricité à partir de charbon. Elle fournit son électricité à un certain prix à ses consommateurs. Si elle peut se fournir en charbon à un prix inférieur, elle pourra répercuter cette baisse sur son prix de vente. Or ce charbon est moins cher car il est de moins bonne qualité : il contient en proportion non négligeable du soufre. La combustion de ce charbon de mauvaise qualité, s'il permet une amélioration du bien-être des consommateurs par la réduction du prix, elle se traduit par une baisse de la qualité de l'environnement (pluies acides, en l'occurrence) : cette baisse n'est pas naturellement intégrée à l'échange marchand. Il faut la réintégrer c'est-à-dire internaliser les effets externes, ces derniers créant des inefficacités. En simplifiant la formulation, il est nécessaire d'inclure dans les prix les dégradations environnementales (pollution, sur-exploitation) qui, sinon, seraient ignorées.
Notons dès à présent que l'économie de l'environnement fait la part belle à un équilibre particulier : l'optimum de pollution. En effet, que signifie « internaliser les effets environnementaux », si ce n'est trouver un équilibre tel, qu'en tenant compte de la variable environnementale, on obtient un équilibre de Pareto. Dit autrement, en grossissant le trait, je ne peux plus améliorer le bien-être des individus sensibles à la variable environnementale sans léser un autre groupe d'individus. Cet optimum de pollution (qui débouchera, on le verra plus loin, sur les marchés de droits à polluer) est souvent la critique la plus importante formulée par les écologistes contre l'économie de l'environnement.
Principes fondateurs
La notion même d'optima dépend de la possibilité d'un choix : qui dois-je intégrer dans ma recherche d'optimum ? qui dois-je défendre et contre quoi ? Comme nous l'avons souligné en introduction, l'économie de l'environnement est intimement liée aux politiques économiques et au choix qui en découlent. Ces choix doivent se formuler de la façon la plus objective possible et doivent, à ce titre, se fonder sur des principes indéniables.
Les choix débouchent sur des résultats. Les résultats sont mesurés par des concepts forgés par l’économie orthodoxe. Par exemple, l’utilisation du concept de valeur ajoutée dans le paradigme classique n’a jamais pris en compte l’empreinte écologique que Mokhtar Lakehal définit, dans Le Grand Livre de l’Economie contemporaine, comme « l’indicateur censé alerter les États et nations sur un danger : l’appauvrissement accéléré des richesses du sol et du sous-sol. Tous les prélèvements effectués dans la nature par l’homme pour satisfaire ses besoins croissants ne sont pas renouvelés entièrement, pour diverses raisons.
En raison du mode de vie occidental qui s’est universalisé, depuis les années soixante-dix, les quantités de ressources prélevées chaque année sont supérieures aux capacités de la nature à se régénérer. Par exemple, certains consommateurs ne savent peut-être pas que sous la pression de la demande mondiale de bois (donc de leurs besoins), le rythme de déboisement des forêts dépasse dangereusement celui du reboisement. Les conséquences sont nombreuses : inondations, coulées de boue, disparitions d’espèces végétales et animales, bouleversement climatique, etc. L’empreinte écologique est en quelque sorte la trace que l’homme laisse dans la nature après chacun de ses passages.
Seuls les cyniques ne veulent pas savoir que toute déforestation aura des conséquences et que tout épuisement d’une ressource affectera la structure des prix sur les marchés. « Qu’est-ce qu’un cynique ? C’est un homme qui sait le prix de toute chose, mais qui ne connaît la valeur de rien », disait Oscar Wilde (L’Éventail de Lady Windermere) ».
LIRE CES LIVRES
1. Ministère de l'Écologie et du Développement Durable, (2003), Rapport « Économie de l’environnement en 2003 »
2. Ministère de l'écologie et du développement durable, Entreprises et environnement. Rapport à la commission des comptes et de l'économie de l'environnement. La documentation française. 2004.
3. Olivier Beaumais et Mireille Chiroleu-Assouline, Économie de l'environnement, Amphi Bréal, 2002
4. Gilles Rotillon, L'économie des ressources naturelles, Repères La Découverte, 2005
5. Annie Vallée, L'économie de l'environnement, Points Le Seuil, 2002
6. Philippe Jurgensen, L'économie verte, Odile Jacob, 2009
7. Chantal et Alain Mamou Mani, La Vie en Vert, le mariage de l'économie et de l'écologie, Payot, 1992